mercredi 25 janvier 2012

Vers une philosophie de l'écoute (2) : Note de lecture

Pour tenter de développer plus avant une philosophie de l’écoute, quoi de mieux que de nous appuyer sur l’expérience de l’auteur, journaliste et traducteur Jean-Pierre Brassac ?

     Le dernier de ses ouvrages, paru en 2005 au moment où la rédaction d’une constitution pour l'Europe posa la question de la place de la religion dans l’Union, s’intitule « Avec ou sans Dieu, 20 étudiants en Europe, religion et laïcité ». Je ne pourrais que recommander ce livre qui est le fruit d’un véritable projet : celui d’organiser par le biais d’Internet, un réseau d’échange et de discussion entre plusieurs étudiants d’Europe, d’origines et de confessions différentes, afin qu’ils comparent et décrivent leurs cultures respectives et la place occupée par la religion dans cette dernière. L’écriture de cet ouvrage est déjà le signe d’une conception de l’altérité tout a fait enrichissante, car dénuée de préjugée.
 
   Mais c’est ici un autre ouvrage publié en 2003 qui retiendra mon attention. Il s’agit du « Royaume qui porte l’eau à la mer ». Dans ce récit de voyage, c'est avec une égale humilité et au fil d’une langue extrêmement riche, que l’auteur va au devant d’éminentes personnalités des Pays Bas, tentant d’éclairer, par le biais des témoignages qu’elles nous livrent, la culture et l’histoire du pays.
Outre la démarche d’immersion totale favorisée par le chois du moyen de transport, j’ai apprécié le caractère éminemment interdisciplinaire de l’ouvrage puisque Jean-Pierre Brassac est doté d’une formation d’ethnologue et d’historien d’art. L'auteur ne néglige de s'intéresser à aucun des facteurs influant sur la culture des habitants, leur capacité à entreprendre ou leur conception du rôle de l'individu au sein de la société. Les éléments naturels avec lesquels les hommes ont dû composer génération après génération sont parmi les facteurs qui comptent, comme au Pays-Bas la rudesse de climat ou l’omniprésence de l’eau qui obligent à une veille constante. 
L'introduction que nous réserve l'auteur attirera notre attention puisqu'elle répond à une question cruciale qui rejoint notre "philosophie de l'écoute" : il s'agit des recommandations faites au voyageur :
Extrait :
« Surtout, ne pas voyager comme l’on parcourt les attractions d’un parc de loisirs. Laisse descendre en soi l’altérité. Devenir pour un temps ressortissant de l’Etat visité.
  Ne pas chercher de rapprochement avec le connu pour comprendre. Observer la société et sa culture dans leur réalité propre, leur étrangeté particulière.
  Entendre la voix personnelle du nous des autres à travers les modulations de son timbre singulier. Déceler l’universel dans le microcosmique.
   Ne pas chercher à satisfaire le besoin de croire en une référence fondamentale qui aurait sa source en quelque lieu idéal. Se dire que toute comparaison est également violence.
   Ne pas mesurer ce que l’on découvre ailleurs à l’aune des traits distinctifs du pays d’où l’on vient. Considérer la civilisation rencontrée comme absolument autonome dans son originalité, nécessairement accomplie dans son essence et ses œuvres. »
ou encore, p 218 « Ne pas corriger son élan d’enthousiasme. La candeur doit rester à la mesure des pensées paisibles qu’inspire ce pays. »

Pour en savoir plus :
http://www.franceculture.fr/oeuvre-le-royaume-qui-porte-l-eau-a-la-mer-cinq-saisons-aux-pays-bas-de-pierre-jean-brassac

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